Les défenseurs de la nouvelle loi sur le jeu d’argent arguent souvent qu’elle permettra de taxer des activités de plusieurs milliards d’euros qui jusque-là échappaient à toute imposition de l’Etat. Comme le soulignait l’article de LePoint.fr sur les conséquence de la nouvelle loi sur les sites illégaux, “avant l’entrée en vigueur de la loi, les opérateurs étrangers capteraient une manne estimée à 1,5 milliard d’euros, soit un manque à gagner fiscal de 112 millions d’euros pour Bercy.” D’autres médias ont affirmé la même chose en reprenant les résultats d’une étude du Monaco IGaming Exchanges.
A contrario, le très intéressant reportage de Public-Sénat sur “les dessous de la loi” parle de cadeau fiscal de l’Etat fait aux opérateurs de jeu d’argent, de la 36ème à la 39ème minute de sa vidéo, concluant à “un manque à gagner pour l’Etat”, appuyé de témoignages et séquences débats courts et d’un schéma très clair, mais peut-être trop simplificateur.
Cette séquence a été suffisamment convaincante pour conduire le site Internet Arret-Sur-Images, à y consacrer un reportage au titre clair : “Avec la loi sur les jeux en ligne, l’Etat perdra de l’argent“, présentation de l’émission ici:
Alors? cadeau fiscal ou non ?
Difficile de trancher au vu des articles, nous n’avons pas trouvé de détails des calculs derrière les différentes affirmations et études.
Nous avons donc procédé à nos propres calculs en faisant des estimations de recettes et pertes fiscales sur les 12 mois suivants l’ “ouverture” du marché du jeu d’argent.
– le loto, les jeux de grattage et les autres jeux de la Française des Jeux (hors paris sportifs)
Aucun gain ou aucune perte fiscale significative puisque la taxation ne change pas concernant ces jeux.
– Les paris hippiques (là où l’Etat perd des recettes)
Le PMU, qui va posséder 95% du marché global post-ouverture, a généré 9,3 Mds€ de CA en 2008, et passera à environ 9,5 Mds€ pendant les 12 mois après l’ouverture.
=> si on passe la fiscalité de 14% à 8.5% cela représentera donc une perte de recettes de 5.5% x 9500 M€ = 522.5 M€ “à compenser”.
– Le poker en ligne
Quand on sait que le marché britannique pèse environ 300 millions d’€ de marge brute (“gross gaming yield”) et qu’une salle de poker prélève grossomodo 5% des mises des joueurs, cela signifie que le marché britabiique est d’environ (un “environ” large) 6 milliards d’euros de mises.
En étant prudent on peut estimer le marché du poker français à 2 Mds€ de mises sur les 12 mois après l’ouverture, soit 2 Mds€ x 2% = 40 M€ de recettes fiscales.
Avec plus d’optimisme, on peut faire un prévision à 4Mds de mises, ce qui génèrerait 80 M€ de recettes pour l’Etat.
– Les paris sportifs
Les mises de paris sportifs sont évaluées à 800 M€ de mises en 2010, 1,4 Mds€ en 2011 et 1,8 Mds€ en 2012 (étude Francis Merlin)
On pourrait donc tabler sur 1.1 Mds les 12 mois suivants l’ouverture du marché x 7.5 % = 82.5 M€ de recettes fiscales. Mais quand on sait qu’un pays comme l’Australie, 22 M d’habitants, a misé près de 3 Mds d’euros en 2009, on peut avoir des doutes sur la prévision ci-dessus.
Si les français misent 2 Mds€ en paris sportifs, cela représenterait une recette fiscale de 150€ M€.
Conclusion
Dans le meilleur des cas, l’imposition du pari sportif et du poker en ligne compenseront de seulement 300M€ le cadeau fiscal au PMU d’environ 500M€.
Il y a donc bien un cadeau fiscal de l’Etat avec celle nouvelle imposition des jeux d’argent, et c’est le PMU qui en bénéficiera, pas les opérateurs privés.